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Interview avec Andrea Hergert, diplĂ´mĂ©e du MBA Management de la Mode d'AVĚěĚĂ Paris

Publié le 15/05/2020

L'Autrichienne Andrea Herget, co-fondatrice de la start-up The Retouch, a remportĂ© le premier Future Innovation Award, un prix de grande valeur lancĂ© par le fashion tech lab parisien Foundry Powered by AVĚěĚĂ Paris et son partenaire IBM en vue d’offrir un soutien aux jeunes entrepreneurs dĂ©montrant un potentiel Ă©levĂ© dans le dĂ©sir de faire Ă©voluer l’industrie de la mode.

Andrea, d’oĂą venez-vous et pouvez-nous nous parler de votre parcours, jusqu’aux bancs d’AVĚěĚĂ Paris et dĂ©sormais dans l’industrie de la mode ?

Andrea Herget : J’ai grandi dans une ville appelĂ©e Graz en Autriche. Mon dĂ©sir de quitter cette petite ville m’a amenĂ© Ă  dĂ©mĂ©nager Ă  Vienne pour Ă©tudier l’administration des affaires internationales. Ă€ Vienne, j’ai eu un avant-goĂ»t de mon rĂŞve, celui de rejoindre le secteur de la mode. J’y ai créé un blog dĂ©diĂ© Ă  la mode appelĂ© La Viennoise. Mon intention Ă©tait de prendre pied dans l’industrie et de crĂ©er des liens. Puis j’ai dĂ©mĂ©nagĂ© Ă  Paris pour mon semestre Erasmus Ă  l’UniversitĂ© Paris Dauphine, oĂą j’ai rĂ©alisĂ© que ma place Ă©tait bel et bien de rejoindre cette industrie. De retour Ă  Vienne, j’ai trouvĂ© un emploi chez Sightline, une marque de mode durable. Sa dirigeante Ă©tait très engagĂ©e dans la politique verte Ă  Vienne et m’a transmis toutes les bases de la mode durable. C’est alors que j’ai Ă©tĂ© acceptĂ©e Ă  AVĚěĚĂ Paris et que je me suis installĂ©e Ă  Paris pour mon MBA Management de la Mode, avec le but de poursuivre dans la mĂŞme voie.

C’est ainsi que le projet de The Retouch a germé ?

Andrea Herget : Pendant mes Ă©tudes Ă  AVĚěĚĂ Paris, j’ai rejoint l’ONG CEC Circular Economy Club, comme volontaire en faveur de la mode durable. Cette expĂ©rience m’a inspirĂ© pour Ă©crire ma thèse Ă  AVĚěĚĂ sur les systèmes de mode circulaire. J’ai rĂ©ussi Ă  visiter le centre de production Tencel (1) en Autriche et ai interviewĂ© Bruno Pieters, le fondateur de HonestBy (2). Mon premier projet professionnel en matière de durabilitĂ©, je l’ai fait auprès de Sondes Louati Jarraya, une crĂ©atrice qui a travaillĂ© quinze ans chez Chanel comme couturière en Haute Couture et a créé une technologie afin de produire des vĂŞtements Ă  moindre impact Ă©cologique. 

Andrea Herget, Jules-Adrien Neret et Andrea Millerand.

Andrea Herget, Jules-Adrien Neret et Andrea Millerand.

Sa technologie brevetée m’a convaincue et je l’ai aidée à créer son business plan. Ce projet m’a donné un aperçu de la façon dont on peut transformer des vêtements et surtout de leur technicité et des possibilités de prolonger leur durée de vie. À la fin de ce projet, mon partenaire et moi avons eu l’idée de mener une recherche sur les retouches de vêtements et peu après, nous avons eu l’idée de lancer The Retouch.

Vous avez remportĂ© le premier AVĚěĚĂ Paris-IBM Future Innovation Award. Quel est votre sentiment ? Qu'est-ce que ce prix change pour vous ?

Andrea Herget : Remporter le prix AVĚěĚĂ Paris x IBM Future Innovation Award, confirme et prouve officiellement la nĂ©cessitĂ© et l’intĂ©rĂŞt de notre projet. Au sein de notre petite Ă©quipe – mon partenaire, Jules-Adrien Neret, et notre couturier, Andrea Millerand, le crĂ©atif de notre sociĂ©tĂ© –, nous avons gagnĂ© en confiance et sommes maintenant prĂŞts Ă  relever le dĂ©fi de rĂ©inventer le marchĂ© actuel des services d’entretien de vĂŞtements.

Vous avez rédigé une thèse ambitieuse, très complète sur les systèmes d'économie circulaire dans l’industrie de la mode. Qu'est-ce qui vous a motivé ? Vous pensiez qu'il était vraiment temps de changer les choses ?

Andrea Herget : Quand j’ai dĂ©butĂ© mon MBA Management de la Mode Ă  AVĚěĚĂ Paris, j'Ă©tais dĂ©jĂ  frustrĂ©e par les problĂ©matiques environnementales et Ă©thiques de cette industrie. J’étais en conflit avec moi-mĂŞme. J’aimais la mode, le bon cĂ´tĂ© de cette industrie mais j’étais aussi bouleversĂ©e que cette industrie ait fait si peu pour limiter le gaspillage et la pollution. Je devais trouver un compromis. J’ai donc dĂ©cidĂ© d’étudier la mode durable. Très vite, je me suis intĂ©ressĂ©e Ă  l’agriculture, Ă  la production (comment certaines parties de la production utilisent telle quantitĂ© d’énergie ou d’eau) et aux tissus (les alternatives au coton et au polyester). Ces sujets sont intĂ©ressants mais j’ai rĂ©alisĂ© que peu d’informations portaient sur le recyclage, la rĂ©utilisation et la rĂ©paration des vĂŞtements. J’en ai conclu que la mode durable n’avait pas abordĂ© la problĂ©matique, rĂ©elle, majeure, de l’industrie de la mode, qui est celle de la surconsommation et de sa cause. Parce qu’il y a peu d’options pour rĂ©utiliser les vĂŞtements ! Au moment oĂą je me suis lancĂ©e sur mon sujet, il n’y avait pas de recherche thĂ©orique publiĂ©e sur l’économie circulaire combinĂ©e avec l’industrie de la mode. Pour moi, c’était donc très excitant de combiner les deux sujets. J’ai beaucoup lu sur l’économie circulaire pour comprendre ses mĂ©canismes et comment l’appliquer Ă  l’industrie. Un mois avant la publication de mes recherches, la Fondation Ellen McArthur a publiĂ© une recherche sur les problĂ©matiques de l’économie circulaire dans l’industrie de la mode. J’y ai trouvĂ© beaucoup de similitudes avec mes recherches. Lesquelles m’ont donnĂ© les bases de tout ce que je fais aujourd’hui.

L’industrie de la mode est rapide, très complexe car elle emploie aussi des millions de personnes. Elle a un impact majeur sur l’environnement et compte parmi les plus polluantes. Au cours de vos études et jusqu’à aujourd'hui, constatez-vous des changements radicaux en termes d’éthique et d’action ?

Andrea Herget : C’est une question difficile, car elle est aussi liée à la culture. Je viens d’Autriche, qui n’est pas vraiment un pays intéressé par la mode. Mais les aspects éthiques et environnementaux d’un vêtement paraissent désormais plus importants aux Autrichiens. Beaucoup de gens sont plus intéressés par la fonctionnalité de la production que par l’esthétique du style. J’ai l’impression que le Royaume-Uni, la Suède, le Danemark ont adopté plus tôt que d’autres le thème de la mode durable – ou encore la France, où les choses changent ces dernières années. C’est comme les ONG et les marques de mode alternative. Le phénomène touche maintenant les conglomérats. LVMH et Kering investissent dans la mode durable. De nouvelles réglementations ont été décidées par les gouvernements qui aident l’industrie à changer – comme la loi qui interdit aux marques de brûler et de jeter leurs collections. Les ONG, les gouvernements et le secteur privé doivent travailler ensemble et continuer à créer des réglementations pour maintenir la pression sur les entreprises qui ne sont pas intéressées par le changement.

Vous pensez d’ailleurs que les petites entités et les startups sont désormais le moteur de l'adaptation à un nouveau et plus efficace mode de recyclage ?

Andrea Herget

Andrea Herget

Andrea Herget : Je pense que les start-ups en général, dans la mode et dans les autres industries, dictent l’innovation. Un bon exemple est celui des entreprises technologiques. Les start-ups technologiques ont perturbé notre façon de vivre de nos jours, comme Instagram, WhatsApp ou Microsoft et Apple. Dans le monde de la mode, le sujet brûlant d’aujourd’hui, c’est la durabilité. Et les solutions viennent aujourd’hui de start-ups qui inventent elles aussi de nouvelles habitudes dans le secteur. C’est pourquoi LVMH, Kering et d’autres géants investissent dans des start-ups.

Êtes-vous préoccupée par les déchets plastiques et les microplastiques qui finissent dans l'océan ?

Andrea Herget : Oui ! Le plastique est un énorme problème pour notre planète. Lorsque vous apprenez qu’un tiers de tous les plastiques produits atterrit dans nos écosystèmes et dans l’océan, c’est très choquant. Dans l’industrie de la mode, ce sont les microfibres en fibres synthétiques qui posent problème, lorsqu’elles sont lavées et finissent dans les océans. Les poissons les mangent, puis nous mangeons ces poissons. Nous sommes pris dans un cercle sans fin dans lequel le plastique est entré depuis longtemps dans notre chaîne alimentaire. L’Union européenne a créé une nouvelle directive pour les producteurs de machines à laver afin qu’ils intègrent un filtre dans les machines à laver nouvellement produites. De cette façon, les microplastiques sont filtrés. De nombreuses innovations sont en cours pour remplacer les fibres synthétiques à l’avenir. Mais il reste encore un long chemin à parcourir…

La « pensée durable » est-elle plutôt une tendance, une mode selon vous, ou une préoccupation réelle et concrète des marques selon vous ?

Andrea Herget : Ce n’est pas uniquement une tendance. J’aime comparer la mode durable à l’industrie alimentaire. Souvenez-vous, quand les fruits et les légumes bio n’étaient disponibles que dans des magasins spéciaux, et quand le bio n’était envisagé que pour les riches ! Maintenant, le bio est devenu presque la norme. Nous savons très bien pourquoi les pesticides et les engrais sont si nocifs pour notre corps et notre santé, et le grand public en est conscient. L’industrie de la mode traverse actuellement la même phase. Il y a dix ans, la mode durable était encore vue comme un mouvement alternatif, et peu de gens connaissaient le côté sombre de l’industrie de la mode. Mais aujourd’hui, nous avons vu des documentaires et entendu parlé des problèmes environnementaux et éthiques de cette industrie. Et ça va si loin que même H&M et Zara créent des lignes de mode durables – et la Fast Fashion est connue pour sauter sur chaque tendance ! Le fait est, nous sommes dans une situation grave. Notre monde est n’est pas illimité. Nous devons prendre des mesures strictes pour mettre fin aux émissions mondiales de CO2. Le comportement des consommateurs évolue. Les gouvernements et les entreprises travaillent ensemble pour faire évoluer le système. J’espère que ce ne sera pas trop tard. Je reste positive. Dans le temps de crise actuel, on constate aussi les élans de solidarité de la société. Nous pouvons aussi combattre, si on le veut, les crises climatiques.

Vous êtes prêt à lancer votre entreprise appelée The Retouch. Pouvez-vous décrire sa ligne d'activités ?

Andrea Herget : L’objectif principal de Retouch (3) est d’accroître la réutilisation des vêtements dans l’industrie de la mode. Nous sommes un service de maintenance de vêtements en ligne. Notre vision est de révolutionner le marché actuel de la transformation des vêtements. Nous donnons une seconde vie à vos vêtements en proposant une alternative à la revente, au don ou à la disposition. Réparer, repenser, réinvente : c’est le credo de The Retouch !

(1)
(2) Une collection et un site de e-commerce jouant la carte de la transparence totale.
(3)

Pour plus d’informations sur le programme d’AVĚěĚĂ Paris suivi par Andrea : Cycle Expert Entrepreneuriat de Mode - Option Tech

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